lundi 22 avril 2013

Portrait et Interview de Frédérick Houdaer


 Biographie :

Neuf livres publiés à ce jour (six romans, trois recueils de poèmes).

A exercé de nombreux petits métiers (trieur de verre, vendeur au porte-à-porte, agent d’accueil dans Foyer de sans-abris, veilleur de nuit, critique littéraire, animateur d’atelier d’écriture...).

Aujourd’hui, directeur de la collection de poésie des éditions LE PEDALO IVRE.

Créateur & animateur du CABARET POETIQUE (au Périscope, à Lyon) depuis 2010.



 Interview de l'artiste :

Comment as-tu commencé à écrire? Qu'est-ce qui t’as poussé à écrire?

F. H. : J’ai commencé tôt. Ce qui ne prouve rien. L’élément déclencheur pour moi : une émission de télé consacrée à Jules Verne, vue dans mon enfance. Une révélation… ou pour être plus précis, quelque chose de l’ordre de la reconnaissance. Non pas « je veux être ça », mais « je suis ça ».

De quoi te "nourris-tu" pour écrire ? Est-ce que d'autres arts t'accompagnent dans la pratique de l'écriture?


F. H. Je suis né dans la seconde moitié du XXème siècle.  Le jour de la sortie de « La horde sauvage » de Sam Peckinpah. N’importe quel auteur gribouillant une page au cours du XXème siècle doit forcément se positionner par rapport au cinéma. D’une façon ou d’une autre. Je me définis souvent comme un « ex-cinéphile ». 
La musique, aussi. Beaucoup. Mais pas quand j’écris.
Quant à la peinture… si demain,  je gagne au loto, je m’achèterai des toiles originales et non des éditions bibliophiles de mes livres préférés.

Tu mentionnes plusieurs petits métiers dans ton parcours en parallèle de l'écriture, t’imprègnes-tu de quelques anecdotes vécus durant ces diverses expériences pour tes ouvrages?


F. H. Je vais me gêner. Mon premier texte publié (à l’âge de 19 ans, j’ai gagné un concours de nouvelles estivales organisées par… le journal Le Monde, ça se faisait à l’époque !) racontait en 3000 signes un job pourri qui m’avait fait suer sang et eau.

Écrivain et poète, tu portes les deux casquettes...Comment as tu été amené a traversé le pont entre les genres : la passerelle entre le roman noir et la poésie? Selon ces deux catégories littéraires, la démarche, et la pratique de l'écriture diffère-telle? 


F. H. La bascule s’est faite pour moi lors d’une résidence d’auteur à Montréal, vers mes 33 ans. J’ai commencé ma résidence en tant que romancier. L’ai finie poète.
Précédemment, j’avais toujours été un lecteur de poésie sans en écrire moi-même. Mais je me souviens, quand j’écrivais ce qui allait être mon premier roman noir publié (« L’idiot n°2 », éd. Le Serpent à plumes), n’avoir lu à l’époque que du Michaux ! Le ver était dans le fruit.

En parlant de plusieurs casquettes, tu diriges notamment une collection de poésie aux Éditions LE PEDALO IVRE : quel regard portes-tu sur les manuscrits que tu édites? Le regard de l'écrivain rejoint-il celui de l'éditeur? Est-il facile de dissocier ou à l'inverse de mettre en adéquation les exigences de l'un et de l'autre? 

F. H. Tout cela (le travail d’auteur, le travail d’éditeur, le travail d’animateur du « Cabaret Poétique ») ne forme qu’une seule et même aventure aux différentes facettes également nécessaires (et aux retombées financières insignifiantes). Souvenir de Tonton Cendrars se définissant comme "une espèce de brahmane à rebours, qui se contemple dans l'agitation. »

Dans tes références littéraires, un nom a retenu mon attention : Fante, celui qui alors inspira dans sa jeunesse Bukowski, et celui là encore qui dans Demande à la poussière n'est autre que le jeune Arturo Bandini, écrivain épris de liberté, pour qui la littérature est une "vocation sacrée" quitte à vivre misérablement...etc... Ce personnage t'inspire-t-il dans son rapport à l'écriture ? 


F. H. Si peu que j’ai appelé mon fils Arthur (comme Bandini) ! Un jour, je lui offrirai « Demande à la poussière ». S’il n’aime pas l’ouvrage, je serai un père cool et me contenterai de le déshériter 

Dans ses vagabondages, errant dans la ville en quête de rien et de tout alors, je ne sais pas pourquoi il y a quelque chose dans cette vision qui me fait vaguement penser au roman noir (peut-être justement la quête, certes non policières, mais tout de même des indices à relever et à révéler.., notamment peut-être le vocabulaire argotique souvent employé par le jeune Bandini au cours de ces rencontres avec les femmes, et autres personnages des quartiers fréquentés).
Mis à part, cette petit écart de réflexion, en rebondissant sur l'adjectif de couleur noir du roman, cela m'amène à te parler de la résidence artistique "Jeunet la nuit, la nuit je naîs" en collaboration avec la compagnie Chiloé : As-tu déjà participé à d'autres résidences mêlant des arts différents?


F. H. Oui. Avec des comédiens et avec des marionnettistes. Dans le quartier de La Duchère et à Vénissieux principalement.

Et la Nuit, qu'est ce qui éveille alors ton intérêt dans ce projet? Est-ce que justement durant le temps de la nuit tu écris ou peu importe le temps de la journée?

F. H. Ce qui m’intéresse le plus dans ce « temps particulier » qu’est la Nuit est… enfin, j’aimerais vérifier que « le mensonge social », tout le « jeu de masques » qui peut caractériser une journée de métro-boulot-dodo s’arrête « la nuit ». Qu’est-ce qui est suspendu, mis sur « pause » la nuit ? Qu’est-ce qui continue ? Qu’est-ce qui n’existe que la nuit ? Sommes-nous égaux dans le sommeil ?

Tout à l'heure, je parlais d'errances du protagoniste de Fante, mais dans la littérature, durant les instants nocturnes, peut-on parler selon toi d’errance, de dérives littéraires?

F. H. Ah, oui… l’art d’être perdu sans se perdre… Je crois que c’est Robert Fillioud qui avait cette formule. Un homme qui savait ce que cela signifiait, rencontrer les autres. Disons une forme d’exploration, sûrement. Pas une conquête. 

Aucun commentaire:

Enregistrer un commentaire